Montreuil, le 27 juin 2016

Objet : Refus illégal de réinscription scolaire de deux lycéennes du Gers (32)

Madame la Ministre,

Nous avons été alertés par des enseignant-es du Gers (32) d’une initiative -semble-t-il après information de la préfecture- de la DSDEN auprès des chefs d’établissements, visant à interdire la réinscription de deux élèves dans leurs lycées, au prétexte qu’elles auraient reçu une OQTF (obligation à quitter le territoire français) : Leïla DAHOUROU, en 1ère L au lycée Alain Fournier de Mirande et Megi LUSHI, en 2nde professionnelle TEBEE, à la SEP du LPO Le Garros à Auch... 

Outre l’indignation légitime que cette initiative soulève auprès des communautés scolaires et des citoyen-nes bien au-delà du département, nous tenons à en souligner l’illégalité. 

Vous n’ignorez pas, comme le rappelle la circulaire n° 2002-063 du 20-3-2002 relative à la scolarisation des élèves de nationalité étrangère des premier et second degrés, "qu'en l'absence de toute compétence conférée par le législateur, il n'appartient pas au ministère de l'Éducation nationale de contrôler la régularité de la situation des élèves étrangers et de leurs parents au regard des règles régissant leur entrée et leur séjour en France". En effet, seule une loi peut interdire l’accès à un service ou à une prestation à un-e étranger-ère en situation irrégulière. La jurisprudence du Conseil d’État est constante à ce sujet. 

Au contraire, la DSDEN du Gers a l’obligation de se conformer à l’article D331-41 du Code de l’Éducation, lequel stipule : "Tout élève admis dans un cycle de formation doit pouvoir parcourir la totalité de ce cycle dans l'établissement scolaire, sous réserve des choix relatifs à la poursuite d'un enseignement optionnel ou de spécialité ou d'un changement de voie d'orientation, conformément aux dispositions de l'article D. 331-38, ou en raison de décisions à caractère disciplinaire". 

Nous savons bien -et nous le regrettons- que ces dispositions ne confèrent pas automatiquement à Leïla et Megi, comme à l’ensemble des élèves étranger-ères en situation irrégulière, un droit au séjour. C’est pourquoi nous continuons à soutenir le combat du RESF (Réseau Éducation sans Frontières) et à agir à ses côtés. À l’évidence, ni la circulaire du 28 novembre 2012 ni la loi Cazeneuve du 7 mars 2016 n’ont réglé quoi que ce soit sur la thématique des élèves sans-papiers. Mais s’il se confirme qu’un service de l’Éducation nationale tourne le dos aux principes énoncés ci-dessus, voilà qui rappelle les moments les moins glorieux du mandat précédent. 

Pour toutes ces raisons, Madame la Ministre, nous estimons urgent et salutaire que vous rappeliez aux services concernés, et particulièrement à la DSDEN du Gers, que leur rôle est de respecter le Code de l’Éducation et non de se faire l’auxiliaire d’une préfecture. 

En vous remerciant de l’attention que vous aurez bien voulu accorder à notre requête, nous vous prions de croire, Madame la Ministre, à notre profond attachement au service public de l’Éducation nationale et à la lutte contre toutes les discriminations. 

Patrick Désiré
Secrétaire général de la CGT Éduc'action

Hervé Basire
Secrétaire général de la FERC-CGT

Le courrier à la Ministre au format