Image La "cagnotte" semble être la panacée universelle du Recteur de Créteil. On se souvient des primes proposées aux enseignants "courageux" qui voudraient bien venir s’installer dans l’Académie. Voilà maintenant que l’on propose de l’argent à leurs élèves pour venir étudier !

Dans le cadre des projets expérimentaux financés par le fonds d’expérimentation pour la jeunesse, l’Académie de Créteil a choisi de lutter contre l’absentéisme et les incivilités scolaires qui frappent tout particulièrement les lycées professionnels. Pour cela, le rectorat met en place, dans trois établissements, un dispositif qui prévoit de verser jusqu’à 10 000 euros par classe pour récompenser l’assiduité et le bon comportement des élèves. On est ici dans une vision libérale et consumériste de l’école, à l’opposé de l’éthique et des valeurs que défend la CGT Educ’action, celle d’une école gratuite, qui donne du sens aux savoirs afin de permettre aux jeunes de se construire en tant que citoyens et futurs salariés de ce pays.

Le projet a déclenché une polémique qui met mal à l’aise le nouveau Ministre de l’Education. Celui-ci peut difficilement désavouer son Recteur le plus appliqué et le plus empressé à mettre en œuvre la politique gouvernementale. Valérie Pécresse s’est, elle-même, déclarée "très réservée" sur le dispositif.

Le fonds d’expérimentation pour la jeunesse a pour vocation de financer des projets innovants visant à améliorer l’insertion sociale et professionnelle des jeunes de seize à vingt cinq ans. Une telle initiative remplit-elle cet objectif ?

L’absentéisme, qui peut déboucher sur le décrochage scolaire, nouveau cheval de bataille de Nicolas Sarkozy, est un réel fléau dont les causes sont multiples. Le décrochage scolaire est un processus lent et cumulatif qui résulte souvent de ruptures dans la vie personnelle et familiale de l’élève. Sans être exhaustif sur les causes, il nous pose la question de la dégradation du service public d’éducation due à des politiques publiques qui vident les établissements des personnels qualifiés pour traiter la difficulté scolaire. On a dénoncé la disparition des RASED dans le primaire, mais où sont passés les médecins scolaires, les infirmières, les conseillers d’orientations psychologues, les conseillers principaux d’éducation, les surveillants..., tous ces interlocuteurs qui accueillaient la détresse des jeunes en difficultés dans les établissements du secondaire ?

Si l’on veut résoudre le problème de l’absentéisme, il faut aussi parler de l’orientation scolaire. Elle se fait la plupart du temps, par défaut, dans les lycées professionnels considérés comme des voies de relégation pour les élèves cumulant difficultés sociales et scolaires. L’absentéisme est un phénomène complexe qui traduit des stratégies d’évitement et une réelle souffrance des jeunes vis-à-vis de l’école. Il nécessite à la fois une prise en charge éducative et parfois médicale. Il ne peut être instrumentalisé par le biais de dispositifs qui ne sont, en fait, que des stratégies de communication dont on peut soupçonner qu’elles visent surtout à satisfaire des ambitions personnelles. Les jeunes n’ont pas à gagner des voyages scolaires parce qu’ils ont été "méritants". Les voyages, les sorties..., font partie des projets éducatifs de tous les établissements scolaires et devraient concerner tous les élèves sans distinction. L’effort, le mérite -on reconnait ici la sémantique présidentielle- seraient les seuls viatiques pour mieux faire fonctionner l’école. On oublie que l’Education est un droit fondamental donné à chacun, quelle que soit sa condition. Cette inversion des valeurs est une honte que nous devons dénoncer.

Montreuil le 06/10/09

Aline Louangvannasy,
Secrétaire nationale CGT Educ’action
Samuel Serre
Secrétaire national CGT Educ’action