Le travail social sous la pression des financeurs ou l’obligation de résultat pour remplacer celle des moyens !

Faire la preuve de leur utilité sociale en évaluant leurs activités avec des indicateurs chiffrés, voilà ce qui est maintenant exigé des associations !

Ces évaluations, sous couvert de contrôler la bonne utilisation des fonds publics comme privés, ne visent pas l’intérêt général mais l’utilité sociale. L’utilité sociale, ce concept libéral qui renvoie à l’individu la responsabilité de sa place dans la société et de ses conditions de vie ! Pour la CGT, avoir une place dans la société est essentiel pour chacun.e mais ceci reste possible tant que les pouvoirs publics garantissent l’intérêt de toutes et tous et définissent une politique de solidarité envers les plus démunis. Ce n’est donc pas à l’individu de faire valoir ses droits. Aujourd’hui, le gouvernement préfère se dédouaner de ses responsabilités et ainsi stigmatise les plus vulnérables.

Dans le secteur du travail social, la baisse des financements est catastrophique et dangereuse. Les pouvoirs publics demandent voire exigent des résultats malgré la baisse drastique des moyens. La généralisation des appels d’offres, la contractualisation viennent impacter l’aide sociale et notamment les services d’intérêts généraux comme la protection de l’enfance.

En effet, la loi de 2007 réformait le secteur de la protection de l'enfance en y introduisant l'austérité financière et le désengagement de l’État vers les collectivités territoriales. Dix ans après, en 2017, une enquête de l'Observatoire National de l'Action Sociale (ODAS) engagée auprès de 2000 acteurs de terrain, indique que 90 % des personnes interrogées déplorent un manque de moyens financiers pour mener à bien leurs missions. Si l'acte 1 consistait à fragiliser financièrement le secteur, l'acte 2 consiste à marchandiser et financiariser la profession d’assistant-e social-e.

Cette mise en place d'une protection de l'enfance au rabais ne menace pas seulement les emplois elle menace aussi et surtout le service rendu :

- Augmentation systématique des délais de prise en charge et de décisions juridiques,
- Placements d'enfants ordonnés par les magistrats mais non exécutés faute de structures d'accueil (Mineurs Non Accompagnés…)
- Décisions judiciaires invalidées faute de réalisation dans des délais de plusieurs mois...
- sous-traitance des missions de service public aux multinationales contre rémunération et contre intérêt « grâce » au Contrat à Impact Social (CIS).

Ces contrats à impact social (CIS), offrent à des investisseurs un gain payé par les pouvoirs publics si le programme social financé atteint ses objectifs. En totale contradiction avec une politique de solidarité, ces contrats s’opposent à l’essence même du travail social, allant à l’encontre de l’intérêt des personnes. La temporalité n’est plus celle de la personne accompagnée. La durée du contrat fixe la règle et impose une pression énorme sur la personne et les professionnel.le.s pour la réussite du programme. De sujets, nous devenons objets du dispositif ! Inacceptable ! La tentation de trier les personnes susceptibles d’aller jusqu’au bout du processus est grande.

Bien trop souvent le travailleur social est dans une position intenable, soumis à des injonctions paradoxales où il lui est demandé d’exercer ses missions dans le respect de la personne accompagnée, malgré des conditions de travail dégradées.

La pensée politique portée sur l’intérêt des populations fait désormais place à une approche gestionnaire.

Pour la CGT, l’intérêt général renvoie au bien commun dont l’État est garant, au bien-être des populations tant dans l’accès aux droits, la réponse à leurs besoins que dans le vivre ensemble. Nous continuerons à la défendre.