Madame la présidente, 

Sécurité dans les établissements
Les événements dramatiques de cet été ont conduit Madame la Ministre à annoncer des mesures de sécurité qui ne sont pas suivies d’un plan permettant leur mise en œuvre pratique. Faut-il rappeler que les personnels de l’Education nationale n’ont pas de formation particulière à la sécurité ? Ce n’est pas non plus dans les missions des CPE ou des assistants d’éducation de s’opposer à une éventuelle entrée en force dans les établissements. Certaines préconisations sont mêmes parfois contradictoires. Contrôler les cartables mais éviter les attroupements, évacuer en cas d’incendie ou de secousses sismiques mais confiner, on ne sait où, en cas de risque terroriste. Les exemples médiatisés peuvent y compris être de fausses bonnes idées. Que penser d’un sas à ciel ouvert entre deux grands portails entre la rue et l’accès réel à l’établissement ? Même si c’est entre deux portes, c’est quand même un attroupement accessible de l’extérieur... 

La conception de notre Ecole est de l’ouvrir sur la vie, vers l’extérieur. L’architecture même des établissements scolaires implique d’avoir une étude au cas par cas par des spécialistes pour leur mise en sécurité. Les établissements en auront-ils les moyens ? 

Par ailleurs, dans plusieurs départements, il a été exigé des Directeurs d’école de communiquer leur numéro de portable personnel. Si le ministère estime que les moyens de communication habituels sont insuffisants (téléphone de l’école, intranet et messagerie professionnelle), il est nécessaire de redéfinir collectivement les prises en charge des événements à risque, quels qu’ils soient. 

Rythmes scolaires
Soucieux de faire admettre la réforme des rythmes scolaires aux municipalités, le gouvernement avait prévu des mesures dérogatoires et transitoires concernant l’encadrement des activités périscolaires. Afin que cette réforme ne pèse pas trop financièrement sur les communes, un plan d’aide financier avait été instauré et le taux d’encadrement avait été modifié pour embaucher le moins de personnel possible. Ainsi, il était prévu un animateur pour quatorze mineurs âgés de moins de six ans et un animateur pour dix‐huit mineurs âgés de six ans ou plus. Ces aménagements ont été vécus douloureusement par les personnels des Collectivités territoriales puisqu’ils dégradaient leurs conditions de travail et apparaissaient comme une négation de leur professionnalisme et de leur spécificité. 

Aujourd’hui, alors que la question des rythmes scolaires n’est pas close pour les professionnels de l’Ecole et pour les parents (renouvellement des projets éducatifs territoriaux, aménagement des horaires…), le gouvernement semble vouloir solder les affaires courantes et les dossiers suscitant des mécontentements. Ainsi, par un décret du 1er août, pendant la trêve estivale, il pérennise le provisoire et l’expérimental en rendant définitif ces taux d’encadrement et les mesures dérogatoires d’organisation de la semaine sur 5 jours. 

La CGT dénonce cette pratique qui nie les remarques des partenaires sociaux et qui institutionnalise davantage des pratiques dangereuses pour les enfants et les personnels intervenant dans le milieu scolaire. 

A l’appel d’une large intersyndicale, les animateurs du public comme du privé ainsi que les ATSEM étaient en grève le 19 septembre pour dire non à la casse de leurs conditions de travail et exiger la reconnaissance de la qualité pédagogique et éducative de leurs missions. 

Elections des représentants lycéens au CA des EPLE
Au CSE du 9 juin, le projet de décret relatif aux modalités de désignation des lycéens dans les instances des EPLE a recueilli un avis défavorable (33 voix contre, 12 voix pour). Sans respecter l’avis négatif du CSE, sans prendre en compte les amendements ayant eu un avis favorable, les textes viennent juste d’être publiés au JO du dimanche 18 septembre avec application immédiate dès cette année scolaire. Il reste donc une dizaine de jours aux établissements pour s’approprier les nouveautés, informer les lycéens qui souhaiteraient être élus au CA qu’ils doivent obligatoirement se présenter au CVL et prévenir les candidats au CVL que potentiellement ils pourront aussi être membre du CA. La citoyenneté et l’engagement des lycéens dans la vie de leur établissement se construisent dans la durée et pas dans la précipitation d’un calendrier électoral contraint, élection dans la 6ème semaine (avant le 7 octobre) et dépôt des candidatures, 10 jours avant. 

Compétences numériques
Les longs échanges qui ont eu lieu en commission spécialisée sur les textes concernant les compétences numériques et leur évaluation ont montré que ces textes posaient de nombreux problèmes. Par ailleurs, l’administration a évoqué la conception en cours d’une plateforme numérique permettant la validation des compétences numériques. Les textes ayant été retirés de l’ordre du jour du CSE, nous demandons que soit réalisé un vrai bilan sur le b2i actuel et que les conséquences en soient tirées avant de nous représenter des textes en CSE. 

Par ailleurs, il n’y a pas d’urgence à mettre en place une nouvelle forme de validation des compétences numériques dès cette année scolaire, les collègues étant déjà submergés de travail avec la réforme des cycles et les nouveaux programmes qui s’appliquent simultanément pour 9 années de la scolarité. Rappelons qu’une majorité de collègues contestent toujours cette réforme et qu’ils s’en accommodent comme ils peuvent. 

Mémoire et histoire sociale 
Dans les thématiques des compétences numériques sont évoquées la « netiquette » et les règles de civilité. Selon Anne Roumanoff qui singe nos petits travers professionnels, il faut rebondir pédagogie. Partons donc d’un exemple concret de l’actualité. 

A l’annonce du décès d’une personne, envoyer un tweet aux seuls abonnés est-ce respectueux de la personne décédée, de sa famille et de son entourage ? Selon la réponse, comment faudra-t-il valider la compétence « interagir » ? 

Sous le semblant de vernis de modernisme informatique cela a surtout permis d’éviter de faire référence aux conquis sociaux de mai 68, à l’annonce du décès de Georges Séguy. Pourtant « mai 68 », c’est uniquement 6 caractères sur les 140 autorisés ! 

Un gouvernement qui passe en force, à coup d’article 49-3, une loi « travail » minoritaire dans son propre camp et rejetée de façon constante par plus de 70 % de l’opinion publique et 90 % des salariés, qui cible ses commémorations et essaye d’effacer de la mémoire collective toute référence aux luttes qui ont permis de gagner les droits qu’il supprime peut difficilement faire des leçons de démocratie. 

Georges Séguy qui a fondé en 1982 l’institut d’histoire sociale de la CGT aimait à dire que : « contrairement aux paroles de la chanson, du passé, il ne faut pas faire table rase ». Pour la petite histoire, Georges a fait, comme il disait, sa première grève à l’âge de 7 ans. Il a séché l’école pour obtenir la libération de son instituteur, arrêté lors d’une manifestation. Lutte contre la répression syndicale, déjà !
Ses enfants nous ont raconté comment, penauds, ils devaient transmettre à leurs enseignants des petits mots de Georges annonçant que le lendemain il ne les enverrait pas à l’école en soutien à telle ou telle profession en grève. Solidarité entre travailleurs, toujours !
Rescapé de Mauthausen, Georges intervenait régulièrement dans les établissements scolaires. Devoir de mémoire encore et toujours ! 

La conclusion sera une déclaration de Georges Séguy faite en 2008, à l’occasion de la sortie de son dernier livre « Résister, de Mauthausen à mai 68 » : « Ne nous y trompons pas. La baisse du pouvoir d’achat des salariés et des retraités, les violations des droits du travail, la mutilation de la Sécurité Sociale, la privatisation des services publics, les cadeaux faits au patronat, les faveurs fiscales accordées aux plus riches, les atteintes au droit de grève, le soutien de l’État aux restructurations des géants de la finance, de l’industrie et du commerce, la complaisance de l’Élysée envers les Etats-Unis, tout cela ne sort pas de la seule imagination de Nicolas Sarkozy. Il s’agit de la mise en œuvre d’un projet mûrement réfléchi, destiné à inclure dans la mondialisation capitaliste, et sous l’égide des Américains, une France libérée de charges sociales prétendument excessives dont l’a dotée son mouvement social. » 

Si cette déclaration a été faite sous la Présidence de Nicolas Sarkozy, elle est malheureusement toujours d’actualité sous la Présidence de François Hollande et la loi « travail » en est l’illustration. 

La déclaration au format