Extrait de la LIJ N°184 du MEN - Juillet 2014 - 

La nouvelle bonification indiciaire (N.B.I.) a été instituée au bénéfice des fonctionnaires, à la suite du protocole d’accord conclu le 9 février 1990 sur la rénovation de la grille des classifications et des rémunérations des trois fonctions publiques, par l’article 27 de la loi n° 91-73 du 18 janvier 1991 portant dispositions relatives à la santé publique et aux assurances sociales. Les dispositions de cette loi prévoient que la N.B.I. est attachée à certains emplois impliquant l’exercice d’une responsabilité ou la mise en œuvre d’une technicité particulière, dans des conditions fixées par décret (1) et qu’elle est prise en compte pour le calcul de la pension civile de retraite et, donc, soumise à cotisation donnant droit à un supplément de pension qui s’ajoute à la pension liquidée, en application du code des pensions civiles et militaires de retraite...

(1) : Le Conseil d’État a jugé qu’« en prévoyant qu’elle peut être attribuée aux fonctionnaires, le législateur doit être regardé comme ayant entendu en ouvrir le bénéfice non seulement aux agents titulaires, mais aussi aux agents stagiaires, dans le cas où ceux-ci seraient appelés à exercer dès leur entrée en service l’ensemble des responsabilités de l’emploi en cause » (C.E., 30 juillet 2003, n° 243678, aux tables du Recueil Lebon). Par ailleurs, la cour administrative d’appel de Lyon a eu l’occasion de juger que la qualité de maître contractuel de l’enseignement privé sous contrat, agent public de l’Etat, pouvait ouvrir droit au bénéfice de la N.B.I. (C.A.A. Lyon, 3 décembre 1996, n° 95LY00175, aux tables du Recueil Lebon).

Aux termes de l’article 1er du décret n° 91-1229 du 6 décembre 1991 instituant la nouvelle bonification indiciaire dans les services du ministère de l’éducation nationale, pris pour l’application de l’article 27 de la loi du 18 janvier 1991 : « Une nouvelle bonification indiciaire (…) peut être versée mensuellement, dans la limite des crédits disponibles, aux fonctionnaires du ministère de l’éducation nationale exerçant une des fonctions figurant en annexe du présent décret. »

L’article 4 du décret dispose que : « Le montant de la nouvelle bonification indiciaire et le nombre d’emplois bénéficiaires correspondant aux fonctions mentionnées en annexe au présent décret sont fixés au titre de chaque année par arrêté conjoint des ministres chargés de la fonction publique, du budget et de l’éducation nationale. »

L’arrêté du 6 décembre 1991 modifié fixant les conditions d’attribution de la nouvelle bonification indiciaire dans les services du ministère de l’éducation nationale définit le nombre de points de N.B.I. attachés aux emplois correspondant aux fonctions mentionnées dans le décret du 6 décembre 1991.

Le décret n° 93-522 du 26 mars 1993 relatif aux conditions de mise en œuvre de la nouvelle bonification indiciaire dans la fonction publique de l’État fixe les principes généraux.

Par ailleurs, les fonctionnaires de l’éducation nationale exerçant certaines fonctions peuvent bénéficier d’une N.B.I. spécifique au titre de la mise en œuvre de la politique de la ville (cf. décret n° 2002-828 du 3 mai 2002 relatif à la nouvelle bonification indiciaire au titre de la mise en œuvre de la politique de la ville dans les services du ministère de l’éducation nationale et arrêté du 3 mai 2002 fixant les conditions d’attribution de la N.B.I. au titre de la mise en œuvre de la politique de la ville dans les services du ministère de l’éducation nationale).

I. LES PRINCIPES GÉNÉRAUX GOUVERNANT LE VERSEMENT DE LA N.B.I.

A. Le versement de la N.B.I. est lié à l’emploi occupé par l’agent

Le Conseil d’État a précisé que le bénéfice de la N.B.I., qui ne revêt aucun caractère statutaire, est lié à l’emploi occupé par l’agent, compte tenu de la nature des fonctions attachées à cet emploi, et non pas à un corps ou à un grade d’appartenance (C.E., 9 septembre 1994, n° 133640, aux tables du Recueil Lebon ; C.E., 22 janvier 2013, Ministre de l’éducation nationale, n° 349918, aux tables du Recueil Lebon, LIJ n° 173, mars 2013, p. 12).

L’article 1er du décret du 26 mars 1993 prévoit ainsi que la N.B.I. « cesse d’être versée lorsque l’agent n’exerce plus les fonctions y ouvrant droit ».

Il en résulte également que le bénéfice de la N.B.I. ne peut être légalement subordonné à la détention d’un diplôme ou d’un titre (cf. C.E., 22 janvier 2013, Ministre de l'éducation nationale, n° 349224, aux tables du Recueil LebonLIJ n° 173, mars 2013, p. 12).

B. Le bénéfice de la N.B.I. et la modification de la liste des emplois attributaires

Dans sa décision n° 340802 du 12 décembre 2012 (Ministre de la défense, aux tables du Recueil Lebon), le Conseil d’État a précisé que « le bénéfice de la nouvelle bonification indiciaire (…), qui ne constitue pas un avantage statutaire, a un caractère temporaire qui cesse avec la cessation des fonctions y ouvrant droit et peut être modifié ou supprimé par l’effet de l’arrêté qui fixe la liste des emplois attributaires et le nombre de points qui leur sont attachés ». Ainsi, la décision par laquelle l’autorité hiérarchique signifie à un agent que la N.B.I. qui lui était versée sera réduite a pour objet et pour effet de l’informer de la nouvelle situation qui est la sienne au regard de la N.B.I. à compter de l’entrée en vigueur de l’arrêté du ministre fixant le nombre de points de N.B.I. attachés aux emplois de l’administration concernée. Une telle décision ne revêt pas le caractère d’une décision susceptible de faire l’objet d’un recours en excès de pouvoir. 

C. Le versement d’une seule N.B.I.

Se fondant sur l’absence de disposition en ce sens dans le décret du 6 décembre 1991, le Conseil d’État a dégagé le principe selon lequel un fonctionnaire affecté sur un emploi unique, mais exerçant deux catégories de fonctions ouvrant droit au bénéfice de la N.B.I. et correspondant, ensemble, à la charge d’activité normale d’un agent ne peut se voir attribuer une double N.B.I. (C.E., 16 juin 2003, Ministre de l’éducation nationale, n° 217324, aux tables du Recueil LebonLIJ n° 79, novembre 2003, p. 11-12).

D. L’octroi de la N.B.I. doit respecter le principe d’égalité de traitement des fonctionnaires

Bien que les dispositions réglementaires applicables prévoient que la N.B.I. est versée mensuellement « dans la limite des crédits disponibles », tous les agents occupant effectivement des emplois correspondant aux fonctions qui ouvrent droit au versement de la N.B.I. et qui comportent la même responsabilité ou la même technicité particulières doivent, eu égard au principe d’égalité, bénéficier de la même bonification (cf. C.E., 26 mai 2010, Garde des sceaux, ministre de la Justice, n° 307786, aux tables du Recueil LebonLIJ n° 154, avril 2011, p. 13-14, conclusions d'Édouard Geffray in AJDA, n° 29/2010, 13 septembre 2010, p. 1659-1662). La limite des crédits disponibles fixée par un texte ne peut conduire à fixer des critères d’attribution de la N.B.I. autres que les critères, posés par le législateur, de responsabilité et de technicité particulières des fonctions liées à l’emploi concerné.

Dans ses conclusions sous la décision précitée, le rapporteur public a souligné que si l’administration était « confrontée à la difficulté de l’élargissement du nombre de bénéficiaires de la N.B.I., il lui appartient soit de jouer sur le degré de responsabilité et de technicité des postes pour réduire les possibilités de la N.B.I., soit, si elle constate l’égale condition d’exercice des fonctions, de procéder à une redistribution égale des points entre tous les agents placés dans une même situation ». Il a ajouté que « le respect de la double exigence du principe d’égalité et de la limite budgétaire implique donc un pilotage fin fondé sur une rémunération des postes visés – et non la détermination d’un volume général – et une réactualisation régulière, jouant sur le nombre à la fois de postes et de points ».

C’est en suivant le même raisonnement que, après avoir rappelé que « le principe d’égalité implique que ne soient pas traités différemment, pour le bénéfice de cette bonification, des agents légalement nommés dans des emplois correspondant à des fonctions ouvrant droit à cet avantage et qui présentent les mêmes caractéristiques de responsabilité ou de technicité particulières », le Conseil d’État a censuré l’erreur de droit commise par un tribunal administratif qui, se fondant sur une circulaire du recteur limitant à deux le nombre de conseillers principaux d’éducation au sein d’un établissement donné, avait estimé que le troisième conseiller principal d’éducation affecté dans le même établissement ne pouvait percevoir la N.B.I., « sans rechercher [s’il] (…) pouvait prétendre à cette bonification eu égard à ses responsabilités et à la technicité de son emploi » (C.E., 16 mai 2011, n° 330159LIJ n° 159, novembre 2011, p. 11-12). 

E. Concernant les agents bénéficiant de certains congés et leurs remplaçants

Les dispositions de l’article 2 du décret du 26 mars 1993 prévoient que : « Le bénéfice de la nouvelle bonification indiciaire est maintenu aux agents (…) pendant la durée des congés mentionnés aux 1°, 2° et 5° de l’article 34 de la loi [n° 84-16] du 11 janvier 1984 (...), ainsi qu’au 3° de ce même article tant que l’agent n’est pas remplacé dans ses fonctions. »

Dans la décision n° 350182 du 13 juillet 2012 (Ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative, aux tables du Recueil Lebon), le Conseil d’État a jugé « que, pour bénéficier de la nouvelle bonification indiciaire attribuée pour certains emplois, un fonctionnaire de l’État doit, d’une part, occuper l’un de ces emplois en y étant affecté de manière permanente et, d’autre part, exercer effectivement les fonctions attachées à cet emploi ; que le fonctionnaire occupant cet emploi et exerçant les fonctions correspondantes conserve le bénéfice de cette mesure pendant la durée de ses congés de maladie et de maternité ; que le fonctionnaire qui le remplace pendant ses absences ne peut être regardé comme occupant cet emploi et y étant affecté de manière permanente ; que, dès lors, il ne peut prétendre à l’octroi de cette bonification, même s’il exerce effectivement les fonctions du titulaire de l’emploi ; qu’il en va de même lorsque ce remplacement est effectué pendant les courtes périodes de formation du titulaire de l’emploi dès lors que, pendant ces périodes, le fonctionnaire conserve cette qualité et qu’il ne peut être regardé comme ayant cessé d’exercer effectivement les fonctions attachées à cet emploi » (cf. également C.E., 14 décembre 2012, Ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative, n° 352335).

Concernant l’agent placé en congé de longue maladie, il peut continuer à bénéficier de la N.B.I. tant qu’il n’est pas remplacé dans ses fonctions.

Il en va différemment lorsque l’agent est placé en congé de longue durée dans la mesure où « le congé de longue durée, bien que correspondant à l’une des positions d’activité du fonctionnaire, n’implique l’exercice effectif d’aucune fonction » (cf. C.E., Section, 6 novembre 2002, n° 223041, au Recueil Lebon).

F. Concernant les agents bénéficiaires d’une décharge de service pour l’exercice d’un mandat syndical

Le Conseil d’État a considéré que les fonctionnaires titulaires d’une décharge totale pour exercice d’un mandat syndical ne remplissaient plus la condition d’exercice effectif des fonctions qui ouvrent droit au bénéfice de la N.B.I. (C.E., 27 juillet 2005, Syndicat Interco C.F.D.T. du Maine-et-Loire, n° 255395, aux tables du Recueil Lebon).

Dans ses conclusions sur la décision Bourdois (C.E., Section, 27 juillet 2012, n° 344801, au Recueil Lebon), portant sur un litige relatif au refus du maintien d’une prime de fonctions à un fonctionnaire bénéficiaire d’une décharge totale d’activité pour motif syndical, le rapporteur public a évoqué l’hypothèse spécifique de la N.B.I. en rappelant les principes dégagés par les jurisprudences des 9 septembre 1994 et 6 novembre 2002 précitées, tout en s’interrogeant sur les conséquences à tirer du principe alors posé de la cristallisation de la situation pécuniaire de l’agent.

Bien que la question n’ait pas été expressément tranchée, il pourrait être jugé que reste due au fonctionnaire bénéficiant d’une décharge de service pour l’exercice d’un mandat syndical une compensation « équivalente » au montant de la N.B.I., et non la N.B.I. elle-même, de la même façon que la décision Bourdois a jugé que restait dû l’équivalent des montants et droits de l’ensemble des primes et indemnités légalement attachés à l’emploi que le fonctionnaire occupait avant d’être déchargé de service.

II. LES CONDITIONS DE VERSEMENT DE LA N.B.I. POUR LES PERSONNELS RELEVANT DE L’ÉDUCATION NATIONALE

A. Les fonctions donnant lieu au versement de la N.B.I.

L’annexe au décret du 6 décembre 1991, ainsi que l’arrêté du 6 décembre 1991 déterminent les fonctions qui ouvrent droit au versement de la N.B.I. au sein du ministère de l’éducation nationale, notamment à l’administration centrale, dans les services déconcentrés et dans les établissements publics locaux d’enseignement, ainsi que pour certains personnels enseignants. L’annexe du décret du 3 mai 2002, ainsi que l’arrêté du 3 mai 2002 déterminent les fonctions qui ouvrent droit au versement de la N.B.I. au sein du ministère de l’éducation nationale dans le cadre particulier de la mise en œuvre de la politique de la ville.

Parmi l’ensemble des personnels enseignants, on trouve par exemple les personnels enseignants spécialisés du premier degré chargés de la scolarisation des enfants handicapés ou assurant le secrétariat d’une commission départementale d’éducation spéciale, les professeurs des écoles exerçant les fonctions de conseiller pédagogique auprès des inspecteurs de l’éducation nationale chargés du premier degré, les personnels enseignants du premier degré chargés des fonctions de directeur d’école, les chefs de travaux ou personnels faisant fonction de chef de travaux des lycées professionnels, des lycées techniques et des établissements régionaux d’enseignement adapté et les personnels enseignants chargés d’assurer la coordination des centres de formation d’apprentis.

B. Le cas particulier des enseignants du premier degré exerçant leurs fonctions auprès d’enfants handicapés

1. La N.B.I. est versée aux enseignants qui ne sont pas forcément détenteurs d’un diplôme spécialisé.

Il doit être rappelé que dans sa décision susmentionnée n° 349224 du 22 janvier 2013, le Conseil d’État a précisé « que le bénéfice de [la N.B.I.] (…) ne peut (…) être limité aux fonctionnaires d’un corps ou aux titulaires d’une qualification déterminée, ni être soumis à une condition de diplôme ; qu’ainsi, l’arrêté du 6 décembre 1991 fixant la liste des emplois du ministère de l’éducation nationale éligibles à la nouvelle bonification indiciaire ne pouvait légalement en subordonner le bénéfice à la détention d’un diplôme spécialisé pour l’enseignement des jeunes handicapés ».

Cette exigence de diplôme, prévue initialement par l’arrêté du 6 décembre 1991 jusqu’à sa suppression à compter du 1er juin 2009 par un arrêté du 24 mars 2009, a été à l’origine de très nombreux recours formés avec succès devant les tribunaux administratifs.

2. Le versement de la N.B.I. est conditionné par l’affectation sur certains emplois.

Sur le fondement de l’annexe du décret du 6 décembre 1991 et de l’arrêté du 6 décembre 1991, le Conseil d’État a défini les catégories d’emplois pour lesquelles le versement de la N.B.I. ne s’applique pas parmi les personnels enseignants du premier degré amenés, dans le cadre de leurs fonctions, à prendre en charge des enfants handicapés.

Ainsi, dans sa décision du 11 avril 2012 (Ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative, n° 343441LIJ n° 166, juin 2012, p. 10), le Conseil d’État a estimé que la N.B.I. « ne s’applique pas aux personnels enseignants affectés dans les établissements médico-éducatifs régis par le code de l’action sociale et des familles et qui comprennent des accueils en classe adaptés aux besoins des personnes accueillies ».

Affectés en institut thérapeutique éducatif et pédagogique (ITEP), les enseignants du premier degré ne peuvent donc pas bénéficier de la N.B.I. prévue pour les services du ministère de l’éducation nationale (même décision).

Il en est de même pour les enseignants exerçant en institut médico-pédagogique (I.M.P., cf. C.E., 16 janvier 2013, Ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative, n° 348617LIJ n° 173, mars 2013, p. 12), ainsi que pour ceux accomplissant leurs fonctions en institut médico-éducatif (I.M.E., cf. C.E., 22 janvier 2013, Ministre de l’éducation nationale, n° 352307LIJ n° 173, ibid.).

En outre, les enseignants exerçant leurs fonctions dans des classes d’adaptation (CLAD) relevant du réseau d’aides spécialisées aux élèves en difficulté (RASED), « qui ont pour objet de lutter contre l’échec scolaire et non de scolariser des enfants handicapés », ne peuvent pas non plus bénéficier de la N.B.I. prévue pour les fonctions exercées par les personnels enseignants spécialisés du premier degré chargés de la scolarisation des enfants handicapés (cf. C.E. n° 349918 et n° 349224, susmentionnés).